jeudi 23 juillet 2015

Un truc de fou !

Romain Bardet remporte son premier succès d'étape sur le Tour de France - Crédit : Eurosport
[ANALYSE] Enfin ! La victoire française de haute montagne s’est fait attendre. Mais Romain Bardet a cette fois franchi la ligne en vainqueur à Saint-Jean-de-Maurienne après un raid solitaire de 40 kilomètres. Un moment de bravoure de ce Tour de France 2015.

Tout avait pourtant si mal commencé pour l’Auvergnat. Près de cinq minutes de retard sur Chris Froome au soir de la 9e étape après le contre-la-montre par équipe à Plumelec. Et ce avant même que les coureurs n’aient vu la route s’élever.

Pire, le grimpeur français est repoussé à plus de 22 minutes après les deux premiers actes pyrénéens. Malade, Bardet est méconnaissable. Le sixième du dernier Tour de France n’est plus que l’ombre de lui-même sous la chaleur caniculaire des sommets.


La résurrection en trois actes


On n’ose plus trop croire au sursaut du grimpeur d’AG2R. On se dit que cette Grande Boucle n’est pas la sienne et qu’à 24 ans, il aura bien d’autres occasions de briller.

Pourtant, dès le lendemain, lors de la 12e étape, Romain Bardet reprend confiance en partant dans l’échappée. Certes battu à la pédale par Joaquim Rodriguez et Jakob Fuglsang, sa troisième place a de la saveur, de la cuisse.

L’Auvergnat prend à nouveau la fuite sur la route de Mende lors de la 14e étape. Les jambes retrouvées, Bardet place trois attaques brutales dans la Côte de la Croix Neuve qui font la décision. Du moins le croit-on. Thibaut Pinot le rejoint dans les derniers mètres de l’ascension et… Stephen Cummings au sommet. Le Britannique coiffe sur le poteau les deux Français, jambon pour la victoire d’étape.


Après une terrible crise d’hypoglycémie hier, revoilà Bardet à l’avant cet après-midi avec une vingtaine d’échappés. A deux kilomètres du sommet du col du Glandon, hors-catégorie, trois hommes se détachent dans l’échappée : Jakob Fuglsang, Pierre Rolland et Romain Bardet.

Trois puis deux lorsque le pauvre Danois Fuglsang tombe lourdement à cause d'une moto passée trop près. Dans sa roue, Bardet échappe miraculeusement à la chute. La poisse a changé de camp.

Bardet, voltigeur en descente


A ce moment-là, Rolland lâche prise. Seul le Colombien Winner Anacona de la Movistar a pu recoller sur Bardet qui imprime un gros rythme au train en tête de la course. Derrière, Joaquim Rodriguez, lui aussi échappé, courbe à son tour l’échine. La chance semble même vouloir sourire au Français.

Romain Bardet dans la descente du Col du Glandon - Crédit : Eurosport
Bardet et Anacona franchissent de concert le sommet du Col du Glandon. Restent alors 39 kilomètres à parcourir. Bardet s’emploie tout d’abord à lâcher le dernier survivant de son attaque. Ce qu’il fait durant la descente. Une descente que les meilleurs spécialistes de la discipline, Nibali et Valverde, n’auraient pas reniée. Au passage, le Français confirme ses dispositions pour l’exercice. C’est déjà dans la descente du Col d’Allos qu’il avait bâti sa victoire d’étape sur le Dauphiné il y a un mois.

Derrière, Pierre Rolland, Bob Jungels, Winner Anacona ou encore Jakob Fuglsang ne parviennent pas à s’entendre pour partir à la poursuite du costaud. L’avance monte à 40 secondes au bas de la descente. Se dressent alors les 18 lacets de Montvernier, un col arpenté pour la première fois dans l’histoire du Tour.

Les 18 lacets de Montvernier, col de 2e catégorie - Crédit : Eurosport
Bardet tient son avance et ne sera pas repris, même par Rolland qui a attaqué au sommet de Montvernier pour tenter de le rattraper. Au final, le Français offre la deuxième victoire à son pays, la deuxième aussi à AG2R après le succès d’Alexis Vuillermoz à Mûr-de-Bretagne. Pour l’Auvergnat, c’est la plus grande victoire de sa carrière, la première sur la Grande Boucle.



Les Movistar de Quintana trahissent la course


Du côté des leaders, seuls deux hommes préservent l’intérêt de la course. Alberto Contador et Vincenzo Nibali ont attaqué durant l’ascension du Col du Glandon. Mais si les Movistar n’ont pas répliqué à l’offensive de l’Espagnol, Quintana est sorti, mollement, pour prendre la roue de l’Italien. Repris, Nibali a tenté d’attaquer dans la descente comme Bardet mais les Movistar et les Sky ont fini par contrôler la course.

On ne peut que regretter l’attitude attentiste des Movistar. Car aujourd’hui, simulation ou réelle difficulté, Chris Froome est resté à l’arrière du groupe maillot jaune durant les quarante derniers kilomètres. Le Kenyan blanc avait déjà fait semblant de souffrir lors de la dernière Vuelta avant d’échouer finalement à seulement 70 secondes de Contador au général. Donc on ne sait pas.

Pas de fougue, pas de panache pour autant chez les Movistar. Seulement de la résignation. Valverde était moins bien aujourd’hui. Comme prévu, le champion d’Espagne avait son pic de forme dans les Pyrénées et le voilà en léger déclin. Lâché dans le Col du Glandon, il n’a dû son salut qu’à la longue descente qui suivait.

Au lieu d'attaquer, Quintana (à gauche, blanc), ne fait que revenir sur Nibali (à droite, bleu ciel) - Crédit : Eurosport
Finalement, on croit revoir les années 2009-2011 où les frères Schleck étaient parfois capables de s’allier avec le maillot jaune pour préserver leur place sur le podium plutôt que de l’attaquer.

Des comptes d’apothicaire. Un Tour d’épiciers. Sans doute parce que la Grande Boucle est redoutable cette année et qu’un top 10, un top 5 ou un top 3 auront presque valeur de succès aux Champs-Elysées dimanche. Ainsi, Bauke Mollema a fait rouler les Trek derrière les échappés pour défendre sa neuvième place. Warren Barguil les Giant pour sa dixième. Et les Movistar pour préserver leur deuxième (Quintana) et troisième (Valverde) positions.

Au milieu de tout ça, seul l’orgueilleux Contador et l’anachronique Nibali continuent d’y croire, de se battre. Au cas où Froome flancherait. Mais à trois jours de Paris, la probabilité de voir le Kenyan jaunir une deuxième fois après 2013 prend de l’épaisseur.

Le classement général à l'issue de la 18e étape

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